Le 15 avril 2017
Nous commençons à préparer notre départ vers la forêt amazonienne. Il y a de nombreux séjours organisés pour se rendre dans la jungle. Dans notre guide touristique, certaines agences sont conseillées mais les prix nous semblent très élevés. Nous allons donc voir trois agences différentes dans le centre de Cuzco pour avoir une idée plus précise. Toutes nous font voir des photos magnifiques, des oiseaux de toutes les couleurs, des singes, des serpents et des indiens en tenues traditionnelles. Les prix se valent et nous semblent exorbitants presque 400 dollars par personne pour passer 2 nuits dans la forêt… Et si le programme semble sympathique, nous craignons qu’il manque d’authenticité. De ce fait nous restons sur notre première option, nous rendre chez Willy, un natif d’une petite communauté, qui accueille avec sa femme des volontaires dans un hameau d’un Parc National, le Parc Manu qui se situe au Nord de Cuzco.
Nous faisons quelques courses pour la jungle et nous partons à la recherche d’une housse de couette qui pourra nous servir de drap de soie. Les nôtres ne conviennent pas et nos sacs de couchage en duvet de canard ne seront certainement pas très utiles là bas…
Et comme à chaque fois que nous cherchons un objet un peu particulier ici, notre quête se transforme en jeu de piste. On y prends vite goût, il faut juste être patient.
La plupart des commerces spécialisés sont concentrés dans des quartiers ou des rues, il y a la rue des vendeurs de poulet dans laquelle on voit dépasser des pâtes de volatiles de chaque échoppe, il y a la rue des quincailliers, la rue des coiffeurs etc… Nous nous rendons donc dans la rue des vendeurs de couettes et draps et nous tentons de leur expliquer ce que nous cherchons, si nous sommes persuadés que notre discours s’améliore échoppe après échoppe nous sommes toujours confrontés à des vendeurs ébahis et impossible de mettre la main sur une housse.
Décidés à déguster la spécialité locale: le cochon d’inde grillé, nous nous rendons dans un marché en plein air qui propose différents plats typiques. Les cochons d’inde sont exposés entiers et pour certains on dirait qu’ils sont passés sous les roues d’une voiture… Je crois que je ne suis pas prête. Finalement nous déjeunons dans un restaurant végétarien délicieux, nous faisons le plein de crudités, denrées plutôt rare ici, avant d’aller prendre un bus touristique pour faire le tour de la ville et voir les alentours que nous n’avons pas encore bien explorés. Le tour est terrible, le commentaire diffusé dans le bus est extrêmement fort et la conduite très sportive. Nous nous rendons dans la campagne chez un soit disant chaman qui finit tout juste avec le précédent bus quand nous mettons un pied à terre. Nous assistons à une cérémonie de la Pachamama qui est une mise en scène très douteuse d’une tradition locale qui consiste à rendre hommage à la terre mère, qui est la terre nourricière et symbolise la fertilité et l’abondance. La cérémonie est si douteuse que nous prenons le fou rire quand le chaman aux grandes plumes nous demande de participer et nous ne sommes pas les seuls…
Le dimanche, c’est farniente, nous profitons du soleil pour lire dans la cour de l’hôtel et faire une petite balade l’après midi. Le soir nous passons la soirée à refaire le monde sur notre jolie terrasse en compagnie de deux autres couples de français.
Le 18 avril 2017
À l’Office de tourisme national pour une fois nous avons pu obtenir des informations fiables et surtout précises pour nous rendre en autonomie dans la forêt tropicale.
Nous prenons donc un premier collectivos pour San Jeronimo, petite ville accolée à Cuzco connue pour son marché important et bien achalandé. C’est ici que nous pourrons trouver un minibus pour Salvacion, petite ville au cœur de la forêt. A peine sortis du taxi on nous propose de monter dans un bus, Rémi use de son fameux “un momento por favor” pour nous laisser le temps de récupérer nos affaires et de voir comment se présentent les choses. En discutant nous trouvons très rapidement une camionnette Mercedes aménagée en mini bus qui part dans la demi heure. Par chance nous sommes au deuxième rang, c’est le seul endroit dans ces bus où nous pouvons avoir de la place pour nos grandes jambes. Nous sommes une quinzaine mis à part nous et un autre couple de « gringos » comme ils nous appellent par ici, il n’y a que des locaux. La route est très bonne au début puis au bout d’une heure et demi vient le croisement où l’on change de direction pour aller vers le parc Manu. La transition est assez douce car la piste est en très bon état, la végétation change peu à peu, devient plus sèche et la piste se détériore au fur et à mesure. Nous continuons la descente avec parfois des précipices impressionnants mais nous commençons à avoir l’habitude de ne jeter que des coups d’œil furtifs sur les côtés. Après six bonnes heures de tape fesses on entend un bruit sourd, le conducteur et la plupart des messieurs s’empressent de sortir. À leurs visages on comprend que ce n’est pas simplement un pneu crevé, les amortisseurs ont lâché. Le conducteur ne se démonte pas, il sort tout un tas d’outils de sa boîte à gants et place une espèce de gomme qui d’après ce qu’ils nous explique, permettra d’attendre le prochain garage. La nuit est en train de tomber et nous reprenons la piste à 15km/h en évitant les trous et les pierres, ça prend du temps…
Nous roulons de plus en plus doucement et il reste encore au moins 2h pour arriver à notre destination finale, il fait nuit noire, nous décidons de descendre au prochain village. En descendant nous comprenons mieux pourquoi le chauffeur avait encore ralenti, le pneu arrière est complètement crevé. Le village est calme, on entend des oiseaux et beaucoup de petits bruits qui proviennent de la forêt, nous entrons dans le premier hôtel que nous trouvons. Une mamie est assise devant la télé, elle plie soigneusement des petites serviettes en papier pour le service du lendemain. Très étonnée de nous voir là nous lui demandons si il est possible d’avoir une chambre, sa réponse ne nous rassure pas: “Aqui? Verdad?” (Ici ? Vraiment?). Elle s’empresse d’aller chercher sa fille qui n’a pas l’air plus sûre qu’elle, elle réfléchit et nous demande de patienter. Après 10 min elle vient nous chercher, nous passons par un escalier en colimaçon vieillot et pas très propre avant d’arriver dans un couloir sombre, de nombreux insectes sont agrippés aux murs, de petites fenêtres grillagées laissent entrevoir des pièces, on dirait un couloir de cave. Nous arrivons à la fameuse chambre, un lit, une petite table et 2 cafards écrasés au sol. Nous hésitons un peu mais ne sachant pas si il y a d’autres hôtels nous répondons en cœur “si, si muy bien…” Rémi plein d’espoir demande si il y a une clé, “hum oui oui” nous dit-elle en nous montrant un clou tordu que l’on peut faire pivoter. Il fait une chaleur étouffante dans cette pièce sans fenêtre, pour cette raison et pour ne pas attirer les cafards nous décidons de pique niquer dehors. J’ai la bonne idée d’aller aux toilettes avant de me coucher et là c’est terrible, le plafond est couvert de cafards et autres bestioles, notre modeste moustiquaire qui effleure le lit me paraît dérisoire face à toutes ces bestioles. Après une longue réflexion et un énorme fou rire nous décidons de mettre la moustiquaire de la tente sur le lit avec les arceaux. Il fait une chaleur pas possible à l’intérieur mais je me sens protégée. La nuit est courte.
Le 19 avril 2017
A 5h du matin la famille est réveillée et les enfants crient dans le couloir. Nous en concluons qu’il s’agit certainement d’un ancien hôtel occupé par une famille.
Nous ne tardons pas à quitter les lieux et nous partons à la recherche d’un café et un maté pour le petit déjeuner. En poursuivant sur la route principale nous tombons sur une jeune fille qui boit son café devant une jolie maison, il s’agit en fait d’une auberge où sont hébergées trois touristes, une française et deux australiennes Marie, Margaret et Alicia. Le vrai hôtel était donc là !
Après un tour dans le village qui est assez joli nous essayons de trouver un moyen pour rejoindre le village d’après. La plupart des habitants nous disent qu’il faut attendre le soir, « l’heure des combis ». Les filles que nous venons de rencontrer, cherchent aussi à se rendre à Salvacion. Nous négocions un taxi, une vieille Volvo dans laquelle nous nous entassons à 6.
La forêt est partout et à perte de vue, l’ensemble est très vallonné, entrecoupé par des rivières et petits courts d’eau, nous en traversons quelques uns. Moi qui avait eu une frayeur monstre quand j’étais petite lors de la traversée d’un oued au Maroc avec le break familial, j’ai appris à relativiser ici. Nous prenons l’eau par le plancher à l’arrière, mais rien ne semble anormal pour notre chauffeur, imperturbable, qui s’engage à toute berzingue dans les énormes cailloux qui constituent notre route.
Nous arrivons à Salvacion, le village est plus impressionnant que le précédent tant il est entouré par la forêt, des oiseaux de toutes les couleurs égayent les arbres et poteaux électriques. Étant donné le temps que nous avons mis à trouver un taxi pour arriver jusque là nous n’avons pas espoir de poursuivre notre route aujourd’hui, nous cherchons donc un vrai hôtel. Après deux hôtels plutôt sales nous en trouvons un qui semble propre et avec un ventilateur, le grand luxe ! Comme à notre habitude nous déjeunons au marché, une gentille dame âgée nous apporte une soupe puis un ragoût délicieux accompagné de légumes de la forêt, on reconnaît le yucca mais le reste est inconnu. La mamita nous parle de sa petite fille qui est assise à côté de nous et qui fait ses devoirs. Nous tentons ensuite de nous renseigner sur le bus qui va au village suivant, et le dernier, Shintuya, la communauté native dans laquelle nous avons repéré le volontariat touristique. Ce n’est pas un vrai volontariat car il faut payer un peu, 4€ par jour. Nous n’avons pas eu de réponse récente de leur part car ils n’ont pas internet, c’est donc un peu, voire beaucoup à l’aventure que nous y allons.
Nos trois copines de voyage ont par hasard rencontré notre contact dans le village et nous apprenons que nous pouvons donc tous aller chez lui au village.