Le 3 mai 2017
Après un petit déjeuner au marché de la Paz, un sandwich à la viande pour Rémi et le traditionnel œuf avocat tomate pour moi, nous nous rendons au lieu de départ des collectivos pour Patacamaya.
Sur la route nous avons la chance d’avoir une vue entièrement dégagée sur un des sommets les plus hauts du pays, le mont Illimani, il est somptueux.
À Patacamaya, ville étape pour rejoindre le parc naturel, nous mangeons dans une petite cantine dans laquelle nous croisons un couple de grenoblois qui vont aussi au parc. Nous embarquons dans un autre petit combi, la route est belle, c’est très sec il y a de petits hameaux en pierres parfois et du relief. Nous apercevons pour la première fois des autruches des Andes au loin.
Arrivés au village tout est calme, la grande place est déserte, les commerces fermés, tout est silencieux. On se croirait en plein été, dans un village du Sud de la France, à l’heure de la sieste. En descendant du bus une jeune femme nous accoste et nous propose de loger chez elle. Elle a aménagé deux chambres dans la petite cour de sa maison, c’est simple et parfait pour nous.
Nous faisons un tour dans le village, nous découvrons l’ancienne place et l’église qui sont adorables. Autour de nous la plaine est entourée de volcans imposants et magnifiques. Le volcan Sajama, plus haut sommet de Bolivie, domine l’ensemble du haut de ses 6500 mètres.
Le soir nous dînons entre Alpins, nous sommes trois couples, Grenoble et Annecy sont représentés. Les montagnards nous charrient sur notre bivouac du lendemain car il y a beaucoup de pumas andins dans le parc, nous passons un bon moment à rire.
Le 4 mai 2017
Levés avec le soleil nous partons faire une boucle dans les volcans, il fait très froid et nous supportons gants et bonnets. Il y a des lamas et des alpagas partout et la lumière est douce. Après deux heures de marche dans la plaine nous arrivons aux geysers. De la fumée s’échappe de la terre à de nombreux endroits, en regardant d’un peu plus près nous remarquons des trous un peu partout, de l’eau bout à l’intérieur c’est vraiment surprenant.
Nous démarrons ensuite la montée, une bergère court après un grand troupeau de lamas et de moutons, de mon côté la marche m’essouffle déjà terriblement. La pente est douce mais le plateau est déjà à 4400 mètres, je m’arrête de nombreuses fois pour reprendre ma respiration, ma gorge est serrée, j’ai la sensation que seul un tout petit filet d’air parvient à passer. Chaque inspiration semble insuffisante, c’est très pénible et frustrant car le chemin n’est vraiment pas difficile. Je réfléchis à rebrousser chemin de nombreuses fois mais j’ai très envie de voir le paysage et les lacs d’altitude alors je prends mon mal en patience. Rémi m’encourage et me prends un peu de poids et nous arrivons finalement à la frontière chilienne et au premier lac.
Le vent est très fort au col, il était déjà contre nous dans la montée mais là il nous déstabilise. Tout est extrêmement sec, au sol, du sable noir et de la roche volcanique, nous trouvons un endroit abrité pour faire cuire du quinoa et manger chaud. Les jambes complètement coupées, nous décidons de dormir sur place.
L’après midi passe vite, le temps d’aller voir le lac, pomper et filtrer un peu d’eau gelée pour boire et cuisiner, puis préparer le campement, le soleil commence à décliner. Nous craignons d’avoir froid malgré nos sacs de couchage en duvet de canard et nous cherchons donc à nous isoler un peu du sol rocheux. Peu de plantes poussent dans les environs ce n’est pas évident de trouver de quoi de quoi se constituer un tapis, nous nous rabattons sur quelques lichens trouvés au bord du lac. Nous mettons nos sacs à dos sous nos tapis de sol pour faire une épaisseur supplémentaire. Il est 17h quand nous commençons à préparer la soupe, le soleil est déjà bien caché et la fraîcheur arrive, nous avons la chance d’observer un viscacha, il semble nous observer aussi. Nous sommes à 5000 mètres et chaque effort nous fait tourner un peu la tête et nous essouffle, nous nous économisons au maximum.
Finalement nous avons chaud dans la tente, la nuit est un peu longue pour moi, j’ai beaucoup de mal à dormir et entre le rêve et l’éveil, je n’arrête pas de repenser à nos blagues de la veille et au puma… Je tente en vain d’élaborer des stratégies pour nous défendre si il vient nous rendre une petite visite.
Au petit matin, nos gourdes sont entièrement gelées. Après un petit déjeuner sur le pouce et un maté de coca bien chaud, nous reprenons notre chemin. Rémi se porte toujours bien et de mon côté j’ai moins de difficulté à marcher. Sur le chemin nous croisons plein de viscachas ils ne sont pas farouches. Rémi insiste pour leur donner des morceaux de barre de céréales mais visiblement ils ne sont pas aussi gourmands que nous. Le second lac est très beau. Il est entouré de plantes vertes et de roches noires le contraste est impressionnant. Nous marchons à tout petits pas pour atteindre le troisième et dernier lac à 5200m. Nous comptons les pas pour nous encourager et ne pas nous arrêter trop souvent.
À l’arrivée, comme d’habitude, une merveilleuse récompense: un volcan au sommet enneigé se reflète dans l’eau bleue. C’est magique.
Nous entamons enfin la descente, je commence à avoir mal à la tête, le retour est interminable car le manque d’oxygène nous dévore les jambes et l’estomac. Nous marchons très longuement pour atteindre le village. Épuisés, nous retrouvons les Grenoblois pour le dîner dans une petite épicerie qui fait aussi un peu de cuisine et nous ne tardons pas à aller au lit.
Le 6 mai 2017
Aujourd’hui c’est lessive et farniente, les genoux en feu, nous allons nous baigner dans des termes à une douzaine de kilomètres du village. Ici tout se fait à pied, mis à part deux 4*4 et un bus tous les matins il n’y a pas beaucoup de trafic, ça nous change de la Paz. Le chien de notre hôte nous accompagne, nous sommes bien embêtés car son jeu favori et de faire courir les lamas et alpagas qui paissent gentiment dans la plaine. J’essaye de le confier en vain à une dame qui rentre au village, elle marche lentement sur la piste avec un chargement emmailloté sur le dos dans du tissu coloré. À peine le dos tourné, le chien s’empresse de me sauter dessus avec son regard joueur. Et bientôt des dizaines de lamas se mettent à galoper pour éviter notre chien.
Deux alpagas finissent par se révolter et le retournement de situation est génial à observer. Ce sont deux alpagas qui courent derrière notre chien qui aboie effrayé, l’un d’eux fait mine de lui cracher dessus, le chien pleurniche, nous sommes écroulés de rire.
Nous retrouvons encore des Français dans le bain chaud, décidément ce parc n’attire que des français, deux Lorrains mais aussi deux québécois très sympathiques. Le soir nous ne tardons pas, après un bon plat de pâtes cuisiné à l’abri du vent dans la petite cours de notre logement, nous allons au lit.
le 7 mai 2017
Au petit matin, il fait grand soleil, après un petit déjeuner à l’épicerie du village nous partons à l’assaut du volcan qui fait face à l’imposant Sajama. La pente est douce au départ puis très vite nous nous retrouvons dans une pente très raide dans laquelle nous glissons dans le sable et les cailloux. C’est encore difficile de grimper mais cette fois je n’ai plus de sensation d’étouffement et c’est bien plus agréable. Peu à peu, en utilisant parfois les mains, nous parvenons au sommet. La vue est magnifique, d’un côté l’immense Sajama recouvert d’une épaisse couche de glace et de l’autre le village, puis en arrière plan la chaîne de volcans et la frontière chilienne. Encore une fois l’espace est différent ici, l’immensité nous envahit. Il fait très froid et nous avons oublié nos moufles alors nous nous empressons de glisser dans le sable pour descendre et rejoindre le village. C’est l’heure du réconfort avec un maté bien chaud que l’on déguste au soleil sur la place du village.
Aujourd’hui le président français a été élu, nous sommes une dizaine de français dans le village et personne ne connaît le résultat de l’élection. Aucune maison ne dispose d’internet, nous nous résignons donc à attendre le lendemain pour connaître le verdict…
Le soir nous dînons dans le meilleur hôtel de la ville, un petit morceau de lama et du riz, et pour une fois nous avons même droit à un dessert, une banane au chocolat !